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Lieux communs #2

La rue est un territoire à prendre. Il parait que la Nature a horreur du vide. L’homme moderne aussi. Quelles qu’en soient les raisons, mercantiles, territoriales, esthétiques ou autres, la rue est loin d’être l’espace neutre, neutralisé, que l’on voudrait nous faire croire.

Constat : pour un grand nombre de nos concitoyens, la rue n’est à personne. Or, le terme même d’espace public contredit cette acception : s’il est public, il est à tout le monde. Personne, tout le monde… Finalement, contrairement à la logique, la Doxa semble se fixer sur une sorte de non-lieu, un non espace, un renoncement à la possibilité d’une prise de possession collective, un abandon de ce qui constituait auparavant l’Agora.

Pas d’Agora, pas de discussion, pas de démocratie.

Or, en général, ce qui n’appartient à personne finit par appartenir à ceux qui s’en emparent, le revendiquent, le préemptent.
Publicitaires, policiers, personnes en marge, artistes au sens très large, c’est à dire faiseurs. L’espace public devient donc en définitive un terrain d’affrontement sur lequel de nombreuses doctrines s’affrontent visuellement : image mercantile/gratuite, autorisée/ clandestine, tolérée/méprisée, politique/dénuée de sens, qui embellit/qui dégrade, qui procède d’une démarche/qui ne procède de rien…

Ces différents hiatus, et bien d’autres, dressent un tableau des forces en présence qui se disputent les murs, dents creuses, mobilier urbains etc. dans la ville. Et si cette lutte se déroule sous nos yeux, chez nous, cela se fait en général dans une relative indifférence. Comme si au final, cette question de ce qui est fait et vu dans l’espace public relevait de l’anecdote. N’était pas vu. Donc n’existait pas.

Encore une fois, la question de la réappropriation de l’espace public se pose : est-il nécessaire d’y intervenir artistiquement, esthétiquement, pour que celui-ci se mette à exister ?

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